C'est fois-ci c'est la bonne : nous allons randonner dans le désert. Nous sortons de notre minibus climatisé vers 13h et là Sri nous annonce que nous avons 30 minutes de marche jusqu'au point de rendez-vous où nous allons déjeuner. Je crois que ce fut la partie la plus difficile de ce trek de deux jours : pas encore vraiment acclimaté aux fortes chaleurs, marcher dans ces conditions devient un peu pesant assez rapidement et nous sommes vite mis devant la réalité : dans le désert, l'eau est plus qu'une ressource précieuse, elle est vitale ! Heureusement, la logistique était bien assurée même s'il nous a fallu apprendre à gérer sa consommation pendant la marche afin de gérer le ratio soif / charge du sac ;) Nous arrivons donc au bivouac avec plaisir et un léger coup de chaud en prime; nous déjeunons puis faisons la sieste à l'ombre en attendant de repartir vers 16h lorsqu'il fera moins chaud.
Dès que la chaleur diminue un peu, une petite brise vient de temps à autre apporter un peu de fraîcheur et marcher dans ce désert habité et parsemé de végétation s'avère agréable. Un guide nous accompagne à cette occasion; originaire de Jaisalmer (notre prochaine étape) il parcourt le désert depuis des années et le connaît dans ses moindres recoins. Il marche d'un pas assuré et prend soin de nous ménager de courtes pauses à l'ombre d'un arbre où la gorgée d'eau, de moins en moins fraiche, devient délectation. Rien ne désaltère mieux que de l'eau, c'est un fait; il suffit d'avoir vraiment soif pour se rendre compte qu'à ces moments précis toute autre boisson serait superflue, ce qui sera moins le cas lorsque nous arrivons au campement où une bonne bière légère et fraîche sera vraiment appréciée ;) )
La randonnée se fait au travers de dunes et de crêtes de sable, le paysage est légèrement vallonné sans pour autant atteindre des sommets, ce qui nous va bien car marcher dans le sable est évidemment assez physique. La magie du désert opère lorsque nous voyons arriver au loin des enfants, sortis d'on ne sait où mais nous ayant repérés de loin, qui courent à notre rencontre afin de nous dire bonjour et faire une photo ensemble. Leur sourire est un bonheur simple et ce genre de moment se reproduira à plusieurs reprises, ce qui fait que je garde un souvenir vraiment très fort de cette randonnée. Après coup je ne peux m'empêcher de repenser aux souvenirs relatés par mon ami James Vil lors de ses nombreux voyages dans le sud marocain parmi les nomades berbères. Le sens de l'accueil et la solidarité sont des valeurs communes aux gens qui vivent isolés de tout, au milieu d'une nature qui peut devenir hostile, car ils savent que leur survie peut en dépendre et que l'occasion de partager un moment, même furtif, est essentielles; du coup, le voyageur quel qu'il soit et d'où qu'il vienne est toujours accueilli comme il se doit.
Nous poursuivons notre route, passons de temps à autre aux abords d'une habitation. Une femme, un homme, voire une famille nous font un signe ou un sourire, parfois la discussion s'engage avec Sri et nous sommes invités à entrer dans la cour et à boire le thé mais nous déclinons poliment car nous avons quand même du chemin à parcourir. Après 2h30 de marche, nous arrivons au sommet d'une dune et, comme par magie, notre bivouac est déjà installé en contrebas mais à mi-hauteur sur une partie plate par l'équipe logistique qui est aux petits soins pour nous. Le plaisir d'être arrivé est décuplé par la lumière du moment. Le temps s'arrête. Nous contemplons le paysage et profitons de l'instant. Quelle journée ! La soirée sera également des plus douces, avec un diner savoureux préparé par le cuisinier et un feu de camp pour faire des braises afin de découvrir la chicha made in India. Sri dormira en retrait et à la belle étoile, son petit plaisir à chaque randonnée dans le désert, imité par Clarence qui motivera d'autres membre du groupe, dont moi-même, à faire de même la nuit suivante.
Le deuxième jour, après plutôt une bonne nuit, point de grâce matinée; il ne faut pas partir trop tard pour bénéficier de la fraicheur matinale et marcher jusqu'à notre prochaine étape. Après un petit déjeuner plutôt copieux le groupe se met en marche. Dans la matinée, nous atteignons une école primaire (obligatoire pour tous les enfants). Ils sont sagement assis dehors à l'ombre, deux par deux sur deux rangées; deux jeunes filles qui s'avèreront dégourdies font office de chef de classe. L'une d'elle attire immédiatement mon regard par sa beauté. Son visage présente des traits fins et des yeux qui m'hypnotisent. Je multiplie les portraits sans pour autant être trop insistant. Puis, avec son autre camarade elles se lèvent et vont en rejoindre trois autres afin d'entonner une chanson avec quelques pas de danse. Nous sommes touchés par cette attention et nous applaudissons avec plaisir; un peu timides elles sourient en se cachant la bouche avec les mains puis recommencent. Ensuite le professeur les fait rentrer dans les classes et nous invite à le suivre. Les élèves s'installent un peu bruyamment mais chacun connaît sa place; assis à même le sol sur des tapis, ils nous montrent fièrement leurs livres d'école, notamment un livre d'hindi et un livre d'anglais, seconde langue officielle du pays, héritage colonial qui fait qu'a peu près n'importe où en inde ,on peut se faire comprendre et échanger à minima. Puis Sri distribue des cahiers de coloriage et des crayons et nous prenons congé de ce petit monde. Cette rencontre fut rafraichissante et enchanteresse. Nous repartons emplis de l'énergie rayonnante de ces enfants et marchons encore un moment sous la chaleur redevenue à son point haut de la journée, le soleil étant parvenu à son zénith. Nous arrivons au point prévu à 95% près (private joke ;) ) pour déjeuner et faire la sieste mais l'ombre se fait rare et la chaleur reste un peu étouffante. A 16h, nous reprenons notre marche au travers de paysages vallonnés, rythmée par les rencontres avec les personnes croisées sur le chemin. Une bonne dizaine d'enfants se sont regroupés et, comme à l'accoutumée, nous demandent nos prénoms. Puis ils nous laissent nous éloigner et soudainement ils s'amusent à nous charger en courant, en criant et en rigolant; la scène se reproduit à plusieurs reprises dans une ambiance bon enfant. De nouveau nous passerons une belle soirée sous les étoiles mais nous nous couchons rapidement car la fatigue commence à se faire sentir, les uns sous la tente, les autres à la belle étoile.
Le lendemain matin nous marcherons encore une bonne heure et demie d'un bon pas avant de rejoindre notre minibus. Tout le monde a hâte de prendre la route et d'arriver à Jaisalmer pour prendre une douche après deux jours sans pouvoir évidemment se laver sauf à se passer quelques lingettes. L'expérience du désert du Thar restera à mes yeux un moment fort de ce séjour.